Le retour des 4 Affreux - Explo Joly 27-28-29 décembre 2024
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On l’a dit, on l’a fait. Nous y sommes retournés.
Pour rappel, ce compte rendu est la suite de celui-ci :
Cette fois-ci, nous avons un peu plus réfléchi, pour éviter de trop souffrir, on a décidé de faire une séance de pré-équipement de la cavité jusqu’à -250.
Cette séance a été réalisée avec brio pour mes 29 ans, grâce aux copains !
Nous nous rejoignons le jeudi 26 au soir, Emeric, Max et moi, un peu plus détendu que la dernière fois !
C’est vendredi 27 au matin, que nous rejoignons Leo à Saint-Christol, sur les coups de 10h30. Nos kits sont déjà prêts à l’emploi (aussi lourd que la fois dernière, perfos, pulses, à manger, à boire, le duvet décontaminé et même des tatanes).
11h30 - tout le monde glisse sur les cordes, maintenant nous connaissons, plus de « ouinouinouin » qui tienne, nous enchainons les méandres. Même Emeric n’enlève pas son baudrier ! (En tous cas dans le premier méandre).
17h – arrivée au bivouac, on est large niveau timing ! On prend le temps de faire nos kits pour l’explo du lendemain pendant que Emeric se lance dans une opération BTP pour l’aménagement d’un bivouac de qualité, et ainsi nous faciliter l’accès à l’eau sans jouer à l’équilibriste en évitant plusieurs
trous.
Cependant, tout est trop parfait il y a une couille dans le potage…
Le saucisson de Léo a pris l’eau dans le second méandre, malheur, celui-ci lui a couté 30 balles.
Malgré cet évènement tragique, nous prenons l’apéro sur une note festive ! Nous nous rendons compte que le bivouac est trop petit pour des énergumènes de ce type (je ne dirais pas qui), par inadvertance du foie gras dégouline sur une chaussette, pas de soucis nous avons de nouveau ramener notre aspirateur sans fil.
Après un bon repas, nous nous endormons (cette fois-ci) chacun dans son duvet, chacun sur son matelas, chacun sa petite place avec une petite musique d’ambiance, avec la hâte d’être au lendemain pour découvrir ce que le Joly nous réserve.
Samedi matin – réveil 8h par le capitaine du sous-marin (autant vous dire que ça ne rigole pas).
On est tous gonflé à bloc, on n’a jamais été aussi rapide, on enfile nos combis mouillés sans rechigner et c’est à 9h30 qu’on se divise en 2 équipes pour partir à nos objectifs opposés.
Notre objectif, à Emeric et moi, est de continuer l’escalade des Ardéchois dans la rivière Gamma.
Nous nous étions arrêtés sur un gros puits remontant, nous savons que celui-ci avait été entamé par les ardéchois mais n’a jamais été fini. Tout du moins ce sont les infos que nous avions.
Lors de la remontée de la rivière au détour d’un méandre, juste avant notre terminus, un recoin attire mon attention, en montant en oppo sur des minuscules chou-fleurs qui font crounch-crounch (oups désolé les mini concrétions), je tombe nez à nez avec une jolie surprise qui sent bon pour un
accès plus direct !
Motivé comme jamais, Emeric se lance dans la première longueur pour atteindre un palier qui sera notre camp de base pour étaler notre bordel. Deuxième surprise de la journée, moins bonne que la première, une ligne de goujons rouillés monte le puits en diagonale…. Le puits a déjà été grimpé…
Notre motivation et notre énergie s’éteint comme une acéto en manque d’eau…
Sans aucune information sur la suite, on se pose des milliers de questions, pourquoi les ardéchois ont déséquipé leur escalade ? Il y a de l’eau qui arrive du haut du puit mais ça pince ? Pourquoi ils ont déséquipé ? Pour récupérer leurs cordes ? Ils n’ont peut-être pas eu le temps de revenir ? Mais ils
sont peut-être passés à côté de quelque chose ?
Une seule réponse, monter pour vérifier.
Nous avons alors fait une longueur chacun, au total un peu plus de 23m ont été grimpés. Mais nous n’avons pas sorti le puits, la ligne de vieux goujon et la pluie du plafond aura eu raison de nous. Ça sera pour une prochaine fois. Nous revenons au bivouac sur les coups de 18h, retrouvant Max et Léo
en plein travaux BTP et des étoiles plein les yeux.
Pour eux ça s’est passé différemment, Maxime nous raconte :
De notre côté, l'objectif est de continuer notre explo de la dernière fois. Elle était arrêtée à la base d'un magnifique P10 circulaire, avec l'actif arrivant par le milieu du plafond. Pour rappel, le croquis d'explo de novembre dernier :
Cette fois-ci nous rejoignons la zone par la jonction que nous avons faite la dernière fois, avec les cordes de Léon et Zap.
C'est nettement plus rapide, même s'il y a plein de passage de nœud car nous avons viré les bouts de cordes abimés la dernière fois. Par contre une des longueurs passe pile en dessous de l'actif, bordel nous sommes déjà bien trempés seulement dix minutes après avoir quitté le bivouac ! Si nous trouvons une suite, nous rééquiperons hors-crue cette partie et feront quelques autres améliorations.
Finalement nous arrivons rapidement à notre nouveau point de départ du jour : la base du P10.
Nous sommes peu confiants, car vu d'en bas, l'eau sort du milieu du puits, et nous ne voyons pas de lucarne depuis le bas, la suite n'est pas assurée.
Nous pensons même que nous allons rapidement buter et que nous rejoindrons alors nos copaings qui grimpent l'actif de la rivière gamma.
Leo me laisse grimper en premier.
Arrivé en haut du puits.... Pouah ça ne fait pas envie. L'eau sort d'un passage large mais très bas de plafond. C'est vraiment moche comme sortie de puits, mais ça peut passer alors il faut aller voir... Leo me rejoint au nouveau frac, puis hop, petit pulse en plafond et je m'engage dans la suite... en rampant. A moitié dans l'eau, je fixe la main courante sur deux pulses et Leo me rejoint. Nous rampons 2/3m à peine et… comme on s'y attendait fin de de l'histoire.
Un gros silex bloque la suite qui de toute manière ne fait pas envie. Le passage est impénétrable,
petite déception même si on s'y attendait.
Aussi grand qu'une douche de sous-marin
Bon attend on ne sait jamais... Marteau en main, c'est parti pour vingt bonnes minutes de frappe sur ce silex qui se réduit petit à petit. Pendant ce temps Léo filme avec mon téléphone. Finalement ça le fait, et après avoir fait tomber le bodard, ça passe... au poil de cul !
Finalement la suite est étroite, mais ça passe, on avance un mètre, puis deux puis c'est parti... Nous sommes dans un méandre (ou boyau) bas de plafond, de nombreux passages sont étroits voir très étroits, à travers des silex énormes qui perturbent la progression. Parfois il faut passer en dessous, et
ramper dans des flaques énormes, parfois au-dessus où on y trouve de l'argile bien boueuse.
Finalement après seulement dix/vingt mètres de progression nous faisons face à ce qui pourrait être un siphon ou une voute mouillante, ce n'est pas très clair : une grosse flaque qui semble assez profonde, un à deux mètres de long, pas beaucoup d'air au-dessus, et au bout ce n'est pas clair.
J'hésite, Léo aussi. On fait quoi là, on s'arrête là où on tente le bain ? Léo me répond en rigolant "T'es un explorateur ou t'es pas un explorateur ?"
Il plaisante mais finalement il a raison... Aller bordel je m'y engage, le corps entier sous l'eau, une oreille est sous l'eau, juste assez de place pour pouvoir encore respirer.
Tiens, on pourrait l’appeler comme le passage emblématique de l’oreille mouillée.
Finalement ce passage est court et une lucarne apparait au-dessus et je peux m'y mettre debout ! Léo ! Le méandre continue ! "Ok va voir et tu me dis !".
Je continue, Leo tente de casser le bord de la voute mouillante pour en faire baisser le niveau.
Tous les cinq mètres j'ai l'impression que c'est la fin, mais non après chaque nouvelle étroiture ou mini virage, la suite apparait. Je parcours 20 mètres peut-être, certains passages sont plus larges, par moment il est même possible de se remettre debout pendant des cours instants.
Finalement je fais machine arrière pour prévenir Léo que ça continue.
Je gueule "Léo, ça continue !" "Okkkk" puis un charabia incompréhensible.
Je reviens jusqu'où je suis allé, c'est "spacieux". J'attends Léo assis confortablement. Je trouve un caillou en qui ressemble à une énorme dent de requin, c'est rigolo.
J'éteins ma lumière et je rêve... Allons nous trouver quelque chose... Ou bien si ça se trouve Léo me rejoint, on repart et paf dans cinq mètres fins de l'histoire... Bref je suis pensif. Au bout de 5/10min jevreprends mes esprits. Mais que fait Léo...
"LEOOOOOOO !!!!"
Pas de réponse... Je reviens 5m en arrière... "LEOOOOOOO !!!!"
Toujours pas de réponse. Encore 5m... "LEOOOOOOO !!!!"
Bordel mais il branle quoi, je commence à m'inquiéter. Finalement je reviens franchement en arrière et j'entends enfin des coups de marteau !
"Oh Léo tu fais quoi, tu me rejoins !?"
"Mais ça continue encore ?"
"Oui, bouge toi l'oignon et passe-moi cette voute mouillante !"
Il me rejoint, j'ai pris un doux plaisir à écouter ses gloussements au moment où il s'est mis dans l'eau!
Aller c'est reparti, on progresse, lentement mais surement. C'est par moment très étroit, mais plus aucun silex ne nous bloque totalement le chemin, et pas d'autre voute mouillante, même si parfois nous traversons des flaques profondes. Nous sommes heureux, même si c'est infâme et difficile, nous sommes heureux de faire de la première car nous ne sommes pas hyper habitués à cela, et finalement ce méandre est plutôt joli en
fait.
Au bout d'un moment (on estime à la louche une centaine de mètre mais vraiment grosso merdo), ça se divise en trois ! Un départ vers la gauche, plutôt type boyau boueux, un en face, propre, et un à droite, propre aussi mais avec l'actif qui y coule. Il est probable que celui d'en face et de droite se
rejoignent.
Je m'engage spontanément dans celui qui est boueux, en pensant qu'il va vite s'arrêter.
Je fais 5m mais ça continue.
Léo me suggère qu'on aille plutôt d'abord explorer les "propres". "Ok, je fais
encore 10m et je reviens".
J'avance, mais finalement j'ai l'impression que ça va déboucher sur quelque chose : ça se rétrécit plus loin devant moi. Un gros caillou rond en silex bouche un peu la suite mais j'observe une petite lucarne au-dessus.
C'est tout noir à travers la lucarne, ça m'intrigue. Je m'approche un peu...
Bordel on dirait qu'il y a du volume derrière ça... "Léo, rejoins-moi, j'ai l'impression qu'il y a quelque chose ici !".
Le temps qu'il me rejoigne, je m'avance, j'ai le cœur qui bat la chamade. La lucarne est petite mais ça passe tout juste, d'ailleurs le tas de cailloux qui bouche la sortie s'affaisse un peu quand je passe dessus, ce n'est pas très stable. Mais je m’en fous, je suis sous adrénaline. Il y a du volume autour de
moi mais je refuse de regarder, j'attends Léo qui sera là dans 30 secondes. En l'attendant je dégage le silex qui bouche le passage.
Il arrive, je tremble, je sens que c'est spacieux, il sort, on regarde autour de nous, dans sommes dans la base d'un immense puits ! Nous levons les yeux en même temps... Bordel, c'est immense !
Nous sommes fous de joie ! Ce type de première est une première pour nous deux !
Pile dans la direction au-dessus de nos têtes, il semble y avoir un plafond, mais plus loin en diagonal et en regardant d'où vient l'actif ça continue, on observe d'ailleurs une grosse lucarne, plusieurs mètres de diamètre, et ça monte encore derrière.
Nous ne voyons pas de plafond au loin, donc le puits doit minimum faire 50m de haut à la louche.
Nous tentons de grimper quelques trucs en libre, dont une cheminée. Mais nous freinons la prise de risque et nous nous arrêtons. Une des cheminées est d'ailleurs très jolie, elle est couverte de coulée de concrétions jaunâtres.
Finalement, les autres départs de boyaux observés précédemment arrive à un autre endroit de ce puits, où coule l'actif.
Malheureusement le téléphone est resté avant la voute mouillante, alors pas d'image pour le moment, mais nous reviendrons le grimper ce puits !
Au retour nous élargissons quelques passages au marteau mais cela reste très étroits par moment.
On va avoir du boulot d'aménagement là-dedans.
Le temps de ces élargissements et le temps de remettre un bout de corde en fixe entre le fractio du haut du P10 et le départ du méandre, nous commençons à être frigorifiés ! Nous redescendons le P10, nous remballons tout le matos puis hop hop hop sans trainer nous retournons vers le bivouac à vive allure !
Au bivouac, petit pyjama, et on se met au sec dans le point chaud, ça va mieux ! Il est à peine 15 ou 16h mais nous n'avons pas encore mangé. Nous nous pétons le bide comme il faut pendant un bon moment. Nous hésitons à nous mettre dans les duvets mais si jamais nous faisons cela, jamais nous n'en ressortirons !
Finalement on tente de se motiver pour rejoindre les copaings, mais pour cela il faut renfiler toutes nos fringues complétement trempées dont on vient de se séparer... dur dur...
Finalement Léo suggère qu'on poursuive l’aménagement du bivouac (de gros travaux d'amélioration). Mais quelle super idée ! Emeric avait déjà commencé vendredi soir en arrivant, l'idée est de poursuivre son
œuvre.
Mais finalement le résultat est le même, il faut quand même quitter nos pyjamas pour remettre nos fringues trempées et froides !
Nous parvenons à nous motiver, et pendant que nous réalisons nos travaux, les voix de Camille et Emeric se font entendre. Nous sommes hyper heureux de les retrouver !
Le repas est pris de bon cœur, on se surprend à manger les parts prévues en plus.
21h tout le monde au dodo, au chaud dans les duvets, mais malgré les boules quies tout ne se passe pas comme prévu.
Le dimanche matin, réveil sonne à 8h30, nous sommes maintenant rodés malgré la nuit difficile, petit déj au lit (sans en renverser de partout), clac clac clac tout est plié, conditionné.
Cette fois-ci, notre remontée fut sous aucune menace du capitaine et de son barreau d’uranium.
Mais si une pause dépassait les 2 minutes 36, il nous regardait tout de même avec des gros yeux.
Nous n’avons pas eu le temps de prendre de photo pour illustrer cette remontée mais voici ce qui s’en rapproche le plus :
17h15 le dernier sort avec les dernières lueurs de soleil !
Mais ce n’est pas fini ! Il reste le déséquipement du début de la cavité. Lors de notre remontée, nous avons pu déséquiper de -250 à -150 pour faciliter la tâche, laissant le kit sous terre.
C’est à la suite de la première sortie club de l’année, dimanche 05 janvier, une petite équipe escandaouienne s’est formée pour finir le travail.
Merci à Benoit et Quentin, qui pour ce dernier était son premier déséquipement de moitié de cavité !
Joly nous reviendrons….